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Soyez les bienvenus sur ce blog qui retrace mon périple d'une année et demie au Canada. J'espère qu'à travers celui-ci, vous pourrez découvrir en partie ce chaleureux et fantastique pays !
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Pour les amateurs de films, n'hésitez pas à visionner les vidéos que j'ai réalisées sur mon aventure canadienne !

23 juil. 2012

Le combat des chefs


Le « fruit picking » continue dans l’Okanagan, en attendant les vendanges, bien plus rémunératrices. L’un de nos contrats nous emmène à Okanagan Falls, sur les rives du lac du même nom. Notre employeur, lui aussi d’origine indienne, possède une dizaine de vergers entre Kelowna et ici, nous proposant un travail quotidien étalé sur six semaines. Un contrat stable est certes sécurisant et attirant, mais au regard de la pauvreté des pommiers, nous n’y travaillerons que quelques jours.

La vue depuis mon "bureau"
L’environnement quant à lui, est unique. La vue sur le lac est splendide, le soleil omniprésent lui octroie des reflets ocre, et son eau pure offre un miroir aux collines dorées, tel qu’on pourrait croire à un immense tableau peint sur l’onde. Et un jour, alors que je travaille au sommet de mon échelle, j’entends un bruit sourd et proche, comme si quelqu’un tapait sur un arbre voisin du mien avec un bout de bois, et d’un rythme saccadé. En descendant de quelques échelons, j’aperçois deux cerfs majestueux, à quelques mètres de moi, qui s’affrontent violemment, bois contre bois. Si l’on en croit le nombre important de ramifications des cornes et leur pelage brun-roux surmonté d’une crinière jeune et peu épaisse, ils doivent être âgés de quatre ou cinq ans. Le combat est équitable et ouvert. Les deux mammifères s’examinent, se tournent autour semblant réfléchir à une stratégie d’attaque. Ils baissent la tête, se présentent élégamment leur armes, et effectuent un soudain bond vers l’avant. Le choc est impressionnant, me confortant dans l’idée de profiter du spectacle du haut de mon échelle. Les bois s’entremêlent, se frottent, s’accrochent et se coincent. Un brusque retrait mutuel, un bref recul, une ruade incisive et le duel reprend son cours. Je m’interroge sur les raisons de ce combat : est-ce pour revendiquer un territoire ? Cette hypothèse me paraît rapidement infondée, puisque les cervidés s’affrontent dans un verger, donc pas un lieu de résidence convenable pour eux. Est-ce un match amical, un entraînement pour affûter leurs bois, pour parfaire leur technique ? Là aussi, l’engagement des deux mammifères montre un certain enjeu à la rencontre. Je comprends rapidement le contexte lorsque j’aperçois de l’autre côté du champ un groupe de trois jeunes biches, suivies de quelques faons intimidés par la majesté de leurs aînés guerriers, et dont la maladresse de certains démontre même un âge très jeune.  La période de rut touchant à sa fin, c’est sûrement leur dernière aventure que ces mâles négocient. Leur simple fierté pourrait également être en jeu. Pour ma part, j’aime à penser que les deux cerfs revendiquent chacun la paternité des adorables faons…

Le combat des chefs

La chasse est ouverte...
Sans vainqueur ni vaincu, le duel s’achève. Les deux protagonistes s’en vont chacun de leur côté, tels deux princes qui signent une trêve, réalisant que le match est nul. Les biches, quant à elles, peuvent être tranquilles sachant qu’elles n’auront à subir aucune cour. Sereinement,  elles se dirigent vers nos bennes remplies de pommes, et se servent insolemment du fruit de notre travail. Intimidé par ces œuvres de la nature, je ne sais trop quoi faire. C’est alors que j’entends le propriétaire accourir et jurer contre les pillards. Me sentant libre d’user de mon droit de protestation, je décroche une pomme et m’en sert comme argument de négociation. Tel David, je la leur jette et atteint l’une des biches en plein cœur. « Get the f*** out of here ! These are mine ! » Comprenant que leur présence est indésirable, la famille emprunte nonchalamment le chemin du retour, se retournant vers moi à quelques reprises en me jetant des regards qui, selon moi ne peuvent signifier qu’une unique chose : « not even hurt, mate ! »






Renaud TEILLARD


7 juil. 2012

Un nouveau contrat


Entre deux contrats, nous passons quelques jours à Vancouver, où nos amis Aymeric et Alice font escale. Pour effectuer une rapide piqûre de rappel, Aymeric et moi étudions dans le même collège en 1999, au LIF (Lycée International Français) de Jakarta, en Indonésie. Et c’est par la plus hasardeuse des rencontres que nous nous étions retrouvés à Montréal, en allant chercher notre numéro d’assurance sociale, douze longues années plus tard. Ensemble, ainsi qu’avec Alice et Renato, nous avions fait l’acquisition d’un van que nous avions réparé, réaménagé, puis finalement laissé entre les mains d’un Québécois qui, faute de parvenir à le vendre, l’avait vendu à une casse, ou « cour à scrap », pour la magnifique somme de 350$. Nous nous étions scindés en deux groupes, Renato et moi partant découvrir l’Ouest canadien, et les deux tourtereaux faisant l’acquisition d’un monospace pour suivre l’itinéraire que nous avions planifié ensemble.
L'intérieur du van, objet de mille joies et douleurs

Nous nous retrouvons à Vancouver quelques mois plus tard. C’est un véritable plaisir que de les revoir, et tant de choses sont dites. Ils nous racontent leur voyage à l’Est, où ils ont pu découvrir le Lac Saint-Jean, la Gaspésie, le Nouveau-Brunswick, puis leur traversée d’un continent à l’autre par les Etats-Unis d’Amérique, et leur mésaventure mécanique dans le Montana, état maudit vu la déconvenue qu’a également connu notre ancienne colocataire Anna où son véhicule a rendu l’âme. Nous leur racontons en parallèle nos aventures parfois irréalistes à Vancouver puis dans l’Okanagan, la facilité à y trouver du travail, l’extravagance de certaines de nos rencontres,…
Ils nous apprennent qu’ils partiront quelques jours plus tard en croisière, sur le voilier d’un ami, pour voguer un mois durant sur les eaux cristallines de la Mer des Caraïbes. La vie est belle… Nous nous remémorons également ces merveilleux moments passées dans l’ancienne capitale du Canada, les longues fêtes costumées, et surtout les heures passées à travailler sur le van, riant à gorge déployées que nous permet le recul et la digestion permise par le temps qui a passé entre-temps.

Mes compagnons Alice, Aymeric et Renato
Après ces heureuses retrouvailles, nos chemins se séparent pour la deuxième fois, en sachant que nous nous reverrons dans les Rocheuses quelques mois plus tard. Il est temps pour Renato et moi-même de retourner à nos pommiers. Quelques heures de trajet à travers monts abrupts et vaux encaissés. Nous quittons la chaîne côtière et pénétrons dans la vallée de Similkamen, rattachée à l’Okanagan. Nous voici revenus à Oliver, et devons récolter le fruit d’Abjit.

Le lendemain matin, nous nous rendons sur son verger, et négocions un prix à la benne. Etant donné la facilité attendue et la richesse de la récolte, le tarif obtenu est légèrement inférieur à la moyenne du marché. Nous nous attelons rapidement à la tâche. A la fin du jour, nous obtenons chacun 110$, en ayant adopté un rythme assez convenable, et fixons un objectifs plus ambitieux pour le lendemain.

Un "picking" plus agréable
Nous restons sur ce contrat une dizaine de jours, et rencontrons différents « pickers » dont Tom, un Canadien natif de la région, et âgé de cinquante-sept ans. L’homme a vécu quelques années de l’autre côté de la frontière puis en a été chassé pour une raison que nous ne découvrirons jamais, ce qui entame notre curiosité d’autant plus grande qu’on lui donnerait le bon dieu sans confession. Mais par-dessus tout, il attire notre plus grand respect, lorsqu’il nous apprend travailler ainsi chaque été lors de congés, depuis de nombreuses années, et son âge ne l’empêche point de travailler plus efficacement que nous. Nous découvrirons par la suite que la situation de cet homme n’est pas unique, et que nombreux sont ceux qui, au lieu de dépenser de l’argent pendant les vacances, consacrent les leurs à gagner près de 10.000$ en moins de six semaines, grâce à une technique améliorée avec les ans.






Renaud TEILLARD